Focus sur… l’accès à l’éducation des filles dans le monde

17 septembre 2019

Chaque année, le mois de septembre remet le thème de l’accès à l’éducation pour tou.te.s au cœur de l’actualité. En cette rentrée 2019, nous avons choisi de rappeler les obstacles qui tiennent encore un nombre très important de filles loin des bancs de l’école, et de présenter les actions d’associations soutenues par la Fondation RAJA-Danièle Marcovici qui luttent pour faire reculer ces barrières.

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LES FREINS À LA SCOLARISATION DES FILLES DANS LE MONDE 

Obstacle n° 1 : les violences basées sur le genre

Partout dans le monde et en particulier dans les pays en développement, le poids des traditions, les conditions de sécurité et le travail des enfants exposent les filles à diverses formes de violences basées sur le genre, qu’elles soient sexuelles, sexistes, physiques ou morales, et qui ont des répercussions directes et néfastes sur leur éducation.

Aujourd’hui, près de 200 millions de filles et de femmes dans le monde ont subi une forme de mutilation génitale féminine (MGF) selon les chiffres de l’Unicef (Fonds des Nations Unies pour l’enfance). Parmi elles, près de la moitié vivent en Egypte, en Ethiopie et en Indonésie. Cette pratique touche 44 millions de filles âgées de 14 ans ou moins, et dans les 30 pays où le nombre de mutilations est le plus élevé, la plupart des victimes ont subi ces violences avant l’âge de 5 ans. Les MGF privent les filles de leur vie d’enfant et d’une scolarité normale. Ces freins à l’éducation sont renforcés par la pratique des mariages précoces et/ou forcés.

Le mariage des enfants reste une pratique autorisée dans 117 pays et territoires. Ainsi, chaque année dans le monde, 12 millions de filles sont mariées avant l’âge de 18 ans. Dans beaucoup de pays, et en particulier dans ceux à faibles revenus, nombre de jeunes filles sont retirées de l’école par leur famille dès la puberté et mariées. Elles sont dès lors confrontées à des obstacles qui impactent directement leur scolarité : normes sociales et coutumes qui les obligent à rester chez elles pour s’occuper des tâches ménagères et plus tard des enfants (4 pays d’Afrique subsaharienne interdisent formellement le retour des filles à l’école après une grossesse), mais également l’épuisement physique et moral lié à l’impact des mariages précoces sur les conditions de santé.

En 2015, l’Organisation des Nations Unies (ONU) à travers ses 193 pays membres s’est engagée à faire disparaître les MGF d’ici 2030, dans le cadre des Objectifs de Développement Durable (ODD). De fait, l’ODD n°5 vise l’atteinte de l’égalité entre les sexes, notamment par l’élimination des pratiques préjudiciables, telles que les MGF mais aussi les mariages précoces ou forcés. Selon l’Unicef , il faudrait multiplier par 12 le rythme des progrès accomplis au cours des 10 dernières années pour y mettre fin à la date attendue.

> La réponse de Triangle Génération Humanitaire

À Bangui, en République Centrafricaine, Triangle Génération Humanitaire (TGH) mène depuis 2011 des actions de protection, d’éducation et de réinsertion des enfants de la rue, avec un accompagnement spécifique pour les filles, victimes de nombreuses violences (abus physiques, exploitation sexuelle, et autres violences basées sur le genre).

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Obstacle n°2 : le travail des enfants

Le travail des enfants est en grande partie dû à des situations de grande pauvreté des familles, qui font bien souvent travailler leurs filles pour garantir des rentrées d’argent dans les foyers. Considérées comme une charge par leurs familles, ce sont les premières à être exploitées. Lorsqu’il ne les prive pas complètement d’éducation, le travail infantile épuise les filles qui ne peuvent se concentrer sur leurs études, et sont souvent victimes de maltraitance ou d’agressions. Privées de leur enfance et exposées à toutes sortes de risques, leurs perspectives d’avenir et d’autonomisation sont faibles.

De manière encore trop systématique, partout dans le monde, les filles sont privées d’éducation pour la simple raison qu’elles sont nées « filles ». L’éducation des filles n’est parfois pas du tout une priorité de la famille, qui si elle en a les moyens, préférera envoyer les garçons à l’école et chargera les filles de s’atteler aux tâches domestiques. Pour protéger les enfants qui travaillent, il est nécessaire d’encourager le respect du droit à l’éducation via des campagnes de sensibilisation, en assurant une éducation publique de qualité et en renforçant la protection sociale. Ces mesures doivent plus particulièrement cibler les filles qui très souvent migrent seules vers les villes pour fuir la pauvreté des zones rurales et n’ont d’autres solutions que de devenir travailleuses domestiques, voire de se prostituer.
L’ONU a défini la fin du travail des enfants dans 2 des 17 ODD à atteindre d’ici 2030 : l’Objectif 8 (portant sur le travail décent et la croissance économique) qui mentionne l’interdiction et l’élimination des pires formes de travail des enfants, et d’ici à 2025 la fin du travail des enfants sous toutes ses formes, et l’Objectif 16 (Paix, Justice et Institutions efficaces) qui évoque la fin de la traite des enfants et de toutes les formes de violences dont  ils sont victimes.

> La réponse de Futur Au Présent

Dans la région de Ziguinchor au Sénégal, Futur Au Présent a créé la Maison de l’Education afin d’accueillir et d’accompagner chaque année 90 filles issues des familles les plus pauvres pour les sortir du travail précoce et permettre leur autonomisation.

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Obstacle n°3 : l’insécurité et les violences à l’école et sur le chemin

Selon un rapport de l’Unicef publié en septembre 2018, à l’échelle mondiale la moitié des élèves âgés de 13 à 15 ans, soit environ 150 millions d’enfants, rapportent qu’ils ont été victimes de violences entre pairs à l’école ou à ses abords, et un écolier sur trois dit qu’il a été la cible d’intimidations ou mêlé à des bagarres. C’est encore plus vrai pour les filles, qui sont la cible d’abus physiques, d’attouchements et d’agressions à l’école et sur le chemin. Ces données ne prennent pas en compte les attaques volontaires contre des écoles lors des conflits ou des situations d’urgence, qui accentuent la vulnérabilité des filles et renforcent les discriminations qu’elles subissent. En Afghanistan par exemple, le nombre d’attaques dans les écoles a triplé entre 2017 et 2018 (192 attaques en 2018 selon l’Unicef). Cette situation a bien évidemment des conséquences désastreuses sur la scolarisation des enfants, et sur celle des filles en particulier.

A l’école, les filles sont fréquemment exposées aux violences physiques et/ou psychologiques de leurs camarades de classes ou de leurs enseignants. Les stéréotypes de genre, l’absence de réglementation, mais aussi le manque de moyens et d’infrastructures, en particulier de toilettes sûres et séparées pour les filles et les garçons, ne font que renforcer ce phénomène.

Les enjeux de sécurité à l’école ont été largement abordés lors des travaux du G7 en France, et en particulier lors de la conférence « Innover pour émanciper les filles et les femmes par l’éducation », organisée le 5 juillet 2019 à l’UNESCO à Paris. Afaq Mahmoud, artiste et militante pour les droits humains soudanaise a notamment ouvert la conférence en mettant en avant l’interdépendance entre l’accès à l’éducation et la sécurité, en affirmant que l’éducation ne peut être assurée sans sécurité sur les chemins et dans les lieux de l’enseignement ; mais que la paix et la sécurité ne peuvent être atteintes si les jeunes filles ne sont pas formées et accompagnées vers l’autonomie. A l’issue du G7, le Conseil Consultatif (composé de militant.e.s, de Prix Nobel, journalistes, actrices et acteurs de terrain) a également émis une recommandation spécifique sur la sécurité des enfants à l’école : il réclame que les gouvernements garantissent « 12 ans de scolarité gratuite, de qualité et obligatoire pour tous les enfants dans des environnements d’apprentissage sûrs et sécurisés ».

> La réponse de Afghanistan Libre

En Afghanistan, la chute des Talibans a entraîné une importante augmentation du nombre d’enfants scolarisés, mais les écoles manquent cruellement de moyens. Afin de promouvoir l’éducation des filles, Afghanistan Libre a mis en place des cours de soutien pour plus de 900 élèves et assure la formation des enseignantes.

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Obstacle n°4 : la précarité menstruelle et le tabou des règles

Dans de nombreux pays du monde, les règles sont loin d’être considérées comme un phénomène naturel. Synonymes de honte, de discriminations et de stigmatisation, les règles sont un tabou qui a de graves conséquences sur la vie des filles, et en particulier sur leur scolarité. Ainsi, 1 fille sur 10 ne va pas à l’école quand elle a ses règles, soit parce qu’elle n’a pas accès à des toilettes ou à un endroit sûr pour se changer ou que les protections hygiéniques coûtent trop cher, soit parce qu’elle est considérée comme « impure » et contrainte de rester chez elle.
La précarité menstruelle et le tabou des règles touchent des femmes et des filles du monde entier, y compris en France où 44% des femmes éprouvent de la honte pendant leurs menstruations.

En 2016, seulement la moitié des écoles du monde étaient équipées de lavabos et de savon, autrement dit, environ 335 millions de filles fréquentaient des écoles et collèges dépourvus de ces équipements de base pour gérer l’hygiène menstruelle.
La présence d’infrastructures d’approvisionnement en eau et d’assainissement dans les écoles et en particulier des toilettes séparées est essentielle pour éviter l’absentéisme des filles quand elles ont leurs règles. La réduction de la précarité menstruelle revêt aussi un enjeu sanitaire important : pour des raisons diverses (prix des serviettes ou tampons, manque d’eau ou de savon) les filles sont souvent amenées à trouver des alternatives et ont recours au « système D » ou à des méthodes anciennes (morceaux de tissu, coton, feuilles sèches) qui peuvent entraîner des infections.
Pour que les filles ne manquent plus l’école à cause de leurs règles, il est essentiel et urgent de briser le silence et les tabous autour des règles en sensibilisant le plus grande nombre à la santé sexuelle et reproductive, et de garantir l’accès de toutes à des installations sanitaires sûres et à une hygiène menstruelle adaptée.

> Découvrez ou redécouvrez la campagne de CARE France sur le tabou des règles

 

Sources utilisées pour la rédaction de cet article :

  • United Nations Children’s Fund, Female Genital Mutilation/Cutting: a global concern, UNICEF, New York, 2016.
  • UNESCO. Rapport mondial de suivi sur l’éducation 2019 : migration, déplacement et éducation : bâtir des ponts, pas des murs. Paris, 2018.
  • https://www.plan-international.fr/droits-des-filles/pourquoi-les-filles/inegalites-barrieres-droits-des-filles
  • http://files.unicef.org/publications/files/Progress_on_Sanitation_and_Drinking_Water_2015_Update_.pdf
  • https://www.carefrance.org/care-actions/campagnes/tabou-regles-filles-ecole.htm

 

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